L’audit du premier Plan Climat vaudois réalisé par l’EPFL en juin 2022 met en lumière le caractère triptyque d’une stratégie climatique. Les actions possibles face au dérèglement se classent globalement en trois catégories (Rapport d’audit, p. 8): la sobriété, l’efficience et la transition vers des énergies propres. Les recommandations de l’audit portent avant tout sur la dimension de sobriété (p. 20), en tant qu’il s’agit de la moins représentée, et de loin.

Dans la ligne de cette analyse, a été votée en août 2023 une motion demandant au Conseil d’État d’intégrer ce principe dans la révision de la Loi sur l’Énergie. La dernière version en date inclut ce principe comme un des trois piliers de la transition énergétique. Nous saluons cette évolution mais souhaitons qu’elle ne s’arrête pas à une simple déclaration d’intention.

Comme le souligne l’audit de l’EPFL, le principe de sobriété peut être appliqué à tous les secteurs (voir p. 20) :

  1. à l’industrie, en réduisant la consommation de produits industriels;
  2. à l’agriculture, en privilégiant le local, de saison, et bio;
  3. à la mobilité, en réduisant les distances parcourues;
  4. au bâtiment, en limitant la surface construite par personne.

La consommation d’énergie et les émissions carbones peuvent être massivement réduites en agissant sur ces leviers et ce, assez rapidement. Cette approche est d’autant plus pressante que notre consommation tend plutôt à croître qu’à diminuer. Ceci est d’autant plus vrai depuis que la menace d’un black-out énergétique ne plane plus, provoquant une diminution de l’attention accordée aux économies d’énergie et la levée de mesures prises à cette période, comme en témoigne la réponse du Conseil d’Etat à la simple question de Jean Tschopp et consorts “Renouveler les campagnes de sensibilisation pour réduire notre consommation d’énergie”. L’application du principe de sobriété fait malheureusement face à une difficulté de taille: les changements de comportements et de pratiques. Ceux-ci dépendent de facteurs complexes (contextes sociaux, légaux, culturels mais aussi infrastructures, services ou encore système d’approvisionnement)

Il s’agit d’abord de faire la promotion active de la sobriété. Le gaspillage d’énergie ou de matériaux peut être facilement réduit en agissant sur certaines habitudes et pratiques, comme la température de chauffage, la consommation d’eau, l’éclairage, l’adaptation des espaces aux usages ou la mutualisation.

Cependant, la sobriété ne s’arrête pas là. Notre mode de vie est profondément imbriqué avec des activités énergivores ainsi qu’une consommation massive de produits industriels, à l’utilité discutable et à courte durée de vie. Promouvoir la sobriété, c’est aller vers un autre mode de vie, à faible empreinte écologique. Celui-ci ne peut être atteint qu’à l’aide d’une stratégie double. D’une part, en posant des limites aux excès de consommation énergétique et d’autre part, en proposant des alternatives viables à nos pratiques.

Les approches sont multiples; on peut par exemple :

  • faciliter le partage, la récupération et la réparation d’objets ou de véhicules;
  • encourager l’industrie locale, durable, et réparable;
  • faciliter le commerce des produits agricoles locaux;
  • soutenir des activités culturelles locales et à petites échelles;
  • améliorer l’accessibilité d’espaces verts et de loisirs afin de diminuer les trajets;
  • redynamiser le tourisme local;
  • relocaliser les emplois et la production.

En général, il s’agit de penser les changements de mode de vie et de production en interaction avec tous les secteurs, et non pas seulement comme une somme de petits gestes. Il s’agit de travailler à mettre en place les conditions et facteurs qui permettent de faciliter des alternatives et d’autres manières de faire. Il s’agit, en somme, d’un principe directeur qui implique de se demander à quel modèle de société on souhaite aspirer et auquel on doit renoncer, tout en garantissant le principe de justice sociale.

Parce que sobriété n’est pas synonyme d’austérité, il est urgent de promouvoir activement des alternatives à la surconsommation que nous avons connue pendant quelques décennies afin qu’un mode de vie sobre et des pratiques sobres deviennent non seulement possible mais aussi souhaitables, et ce avant qu’il ne soit une nécessité imposée par des catastrophes environnementales ou des pénuries. Car l’avenir sera sobre ou il ne sera pas.

Dans cette optique, je souhaite poser les questions suivantes au Conseil d’État:

  1. Comment le Conseil d’État entend-il concrétiser le principe de sobriété ?
  2. Comment est pris en considération le caractère systémique des pratiques et comportements à changer, c’est-à-dire leur imbrication avec l’organisation sociale dans son ensemble ?
  3. Dans quels secteurs le Conseil d’État veut-il appliquer ce principe ?
  4. Quelles méthodes le Conseil d’État prévoit-il pour induire des changements de pratiques et d’habitudes ?
  5. Quel soutien proactif à des alternatives prévoit-il, en plus d’une simple promotion de la sobriété ?
  6. Quelles limites à la consommation prévoit-il pour réduire les excès de nos modes de consommation et de production ?
  7. Quelle sera la place accordée à la sobriété et aux mesures permettant de la concrétiser dans la nouvelle version du Plan Climat ?

 

Notre groupe parlementaire soutient l’ensemble des mouvements sociaux qui s’engagent pour des réponses aux changements climatiques. Dans cette démarche, nous avons décidé de répondre publiquement à la question suivante posée par Objectif Climat :

« Pensez-vous que les ZAD sont LA solution pour le logement des précaires climatiques ? »

L’interaction entre les conditions de vie socio-économiques et le dérèglement climatique sont au cœur des préoccupations que nous amenons au Parlement. Avec l’augmentation fulgurante de la précarité, la garantie constitutionnelle du droit au logement est en péril. La hausse insoutenable des loyers pousse de nombreuses personnes en situation précaire dans des logements de piètre qualité. Sans intervention étatique, cette tendance est vouée à empirer.

Cette situation est d’autant plus pressante que le changement climatique durcit les conditions de vie et que son effet se fait ressentir d’abord par les plus précaires. Ainsi, les logements mal isolés sont plus exposés aux températures extrêmes. Quant aux coûteuses rénovations assurant la résistance des bâtiments aux inondations, aux séismes et aux incendies, elles sont réservées aux propriétaires aisés ou aux loyers élevés. De même, les populations urbaines précaires vivent en général dans les quartiers les plus denses et ont un accès à la nature limité, notamment en raison de la charge de travail et des prix des transports publics. Elles sont particulièrement sujettes aux îlots de chaleur et à la pollution de l’air, sans échappatoire possible.

Le même problème se pose avec l’énergie. S’adapter aux vagues de froid, aux canicules, ou aux intempéries, surtout dans des logements mal isolés, consomme énormément d’énergie. L’augmentation des coûts aggrave ainsi la vulnérabilité des populations précaires. Celles-ci sont également les premières touchées par les coupures d’approvisionnement, l’accès à une production «citoyenne» d’électricité et de chauffage restant prohibitif (solaire ou pompes chaleur). De même, garantir un accès inconditionnel à l’eau, et ce même en situation de stress hydrique, sera bientôt un enjeu politique de taille. Thomas Sankara disait : « Il faut choisir entre le champagne pour quelques-uns et l’eau potable pour tous », dans notre canton, lors de forte vague de chaleur et de sécheresse, il s’agit déjà de « choisir entre l’eau pour les besoins de premières nécessités et l’eau pour les piscines privées et l’arrosage des pelouses des plus nantis ».

C’est sur la santé que se feront ressentir le plus cruellement les conséquences de la précarité. Les mauvaises conditions de logement et la promiscuité augmentent les risques de maladie, sans parler des conséquences des catastrophes écologiques. Afin d’y répondre, le système de santé doit rester financièrement accessible et ouvert à tout le monde.

Notre groupe s’engagera prochainement au Grand Conseil pour défendre ces positions avec détermination vis-à-vis de la révision de la Loi sur l’Énergie. Celle-ci prend plusieurs mesures longtemps attendues mais omet complètement la dimension sociale. Ainsi encourage-t-elle la rénovation énergétique mais ne protège aucunement contre les augmentations de loyer. Elle ne mentionne jamais les inégalités de logement ou la gentrification liée aux rénovations. La transition du secteur immobilier qu’elle apporte, bienvenue d’un point de vue écologique, risque de creuser les conséquences des inégalités économiques.

Pour faire face à ces problèmes, nous revendiquons :

  • un droit inconditionnel au logement;
  • le maintien en mains publiques des ressources nécessaires à la vie, afin de garantir leur utilisation et exploitation écologique (eau, électricité, chauffage, etc.) ;
  • l’interdiction des coupures d’électricité, d’eau et de gaz en cas de difficultés financières des locataires, et l’interdiction des expulsions ;
  • le contrôle des loyers par l’État avec l’obligation de créer un nombre suffisant de logements à loyer modéré ;
  • l’interdiction de la spéculation sur les logements et les terrains ;
  • un accès gratuit aux transports publics ;
  • un système de santé social et de proximité.

En somme, nous demandons une organisation de l’économie qui assurera une juste répartition des biens et des ressources naturelles essentielles à la vie.

Enfin, pour répondre plus directement à la question, notre groupe craint qu’à l’avenir, les conséquences du dérèglement climatique poussent les plus précaires à s’établir dans des « Zones à Défendre » (ZAD), devenant alors plus exactement des bidonvilles. Il est nécessaire de souligner que ce qui est volontiers qualifié de ZAD n’est pas forcément un choix de vie ou une conviction idéologique. Nous condamnons d’avance la stratégie qui consisterait à dissimuler la précarité derrière des faux-semblants politiques ou culturels. D’autant plus que celle-ci est d’ores et déjà à l’œuvre derrière la criminalisation du sans-abrisme, perçu dans la loi comme du «camping sauvage» mais résultant d’une politique cantonale et communale  refusant de prendre ses responsabilités. Ce n’est pas la précarité qui est criminelle, mais bien l’aveuglement des autorités face à la réalité des conditions de vie.

Il est temps d’agir maintenant en faveur du climat avec des mesures ambitieuses et contraignantes face aux véritables pollueurs, en défendant d’abord les conditions des plus précaires. Pour ce faire, les ZAD ainsi que les nombreux autres mouvements sociaux, sont des moyens de pressions nécessaires.

 

La révision de la loi vaudoise sur l’énergie (LEN) a été présentée avec le but de “concrétiser les objectifs ambitieux que le Conseil d’Etat s’est fixé dans le cadre du Plan climat et de son Programme de législature”. En attendant les débats autour de la révision de cette loi, force est de constater que les efforts énergétiques doivent intégrer des mesures concrètes de sobriété. Ils doivent aussi être transversaux et multisectoriels pour répondre aux enjeux.

Dans 20 ans, par exemple, notre parc automobile sera entièrement électrique. D’ailleurs, c’est bien la direction d’une électrification du parc automobile que trace l’avant-projet de loi sur l’énergie. Ainsi, tout ce qui est lié aux transports et à la mobilité doit aussi être anticipé en termes d’énergie. Or, à l’heure actuelle, ces deux domaines sont clairement séparés, puisque répartis entre deux départements et régis par des législations différentes. Ceci peut constituer une barrière pour envisager les enjeux énergétiques actuels, étant donné que ce secteur (comme d’autres) est de facto exclu des stratégies énergétiques actuelles.

Le groupe décroissance alternatives (da.) se désole du refus par le PLR à l’unanimité, par l’UDC à l’unanimité, par Montreux Libre en large majorité, de la demande de déclaration de l’urgence climatique et d’un plan climat pour la commune de Montreux.

Avec ce refus, les représentants de ces partis affirment à la fois leur mépris de l’avenir et des conditions de vie des futures générations, la peur de bousculer des habitudes trop ancrées, leur préférence d’un petit confort égoïste, l’incapacité de comprendre autre chose que le profit à court-terme, une complète inconscience des enjeux cruciaux à affronter et, en plus, l’absence de volonté d’assumer leur part de responsabilité face à l’urgence climatique que plus aucune personne raisonnable n’ose minimiser.

Dans la suite d’un cycle de discussions sur l’urbanisme commencé au début de cette année, décroissance alternatives (da.) a tenu une matinée de réflexion ce 25 novembre 2023. Une position représentative du groupe concernant le Plan directeur communal (PDCom) y a notamment été définie.

Décroissance alternatives soutiendra le PDCom présenté par la municipalité. Le texte nécessite certes encore d’actualiser certaines informations, mais notre mouvement retrouve les objectifs de son programme dans les principes et mesures qui seront soumises au vote. 

Dans le cadre du déploiement du crédit-cadre de 50 millions de francs pour les infrastructures touristiques « 4 saisons » voté par le Grand Conseil, le Conseil d’Etat a annoncé sa décision de renforcer son soutien à la rénovation du centre de congrès de Montreux (2M2C) afin d’optimiser la performance énergétique du bâtiment. Cette aide constitue une aide à fonds perdus d’un montant de 10 millions de francs, dont 8’300’000 sont issus de ce crédit-cadre. Si, dans un contexte de transition, un plus ample soutien étatique en matière d’économie d’énergie sur les bâtiments est important, le lien entre la transition des régions de montagne au tourisme 4 saisons et ce projet ne nous semble pas si évident.

L’actualité a remis sur le devant de la scène vaudoise l’actuelle économie fermée du béton. Monopolisée par deux acteurs privés, elle met en difficulté une réduction du recours au béton ou encore l’utilisation de matières premières alternatives. L’impact de cette «économie du gaspillage»1 est si grand qu’il faut la changer. Si des alternatives reconnues existent, elles ne trouvent pas de place dans le système actuel, lucratif pour les concernés. L’impulsion pour casser ce système et le rendre plus durable manque. Un volontarisme politique est nécessaire, par exemple par l’introduction de normes ou de mesures financières rendant ces manières de faire financièrement inintéressantes. 

Dans le rapport de la commission de gestion sur l’année 2021, on pouvait lire au chapitre sur le département de l’énergie, sous-chapitre programme bâtiment, que le budget attribué avait été épuisé au 25 novembre, impliquant la mise en attente de certains projets et leur report sur l’année 2022, comme pour les années précédentes.

Nous entrons dans la dernière partie de l’année, et au vu du contexte énergétique actuel, nous souhaitons que le Conseil d’État renseigne le Grand Conseil sur l’état des projets en cours dans le programme bâtiment. Nous avons donc l’honneur de poser la question suivante au Conseil d’État :

Les différents projets du programme bâtiment prévus pour 2022, incluant le report des projets des années précédentes, pourront-ils être entièrement financés et menés en 2022 ?

Envie de lire cet été ? Voici quelques ouvrages proposés par des membres de da.

Le 31 janvier 2023, le Grand Conseil a accepté à une large majorité la motion transformée en postulat intitulée « Écrans dans l’espace public: incompatibilité climatique » déposée par notre camarade Elodie Lopez.