Notre groupe parlementaire soutient l’ensemble des mouvements sociaux qui s’engagent pour des réponses aux changements climatiques. Dans cette démarche, nous avons décidé de répondre publiquement à la question suivante posée par Objectif Climat :

« Pensez-vous que les ZAD sont LA solution pour le logement des précaires climatiques ? »

L’interaction entre les conditions de vie socio-économiques et le dérèglement climatique sont au cœur des préoccupations que nous amenons au Parlement. Avec l’augmentation fulgurante de la précarité, la garantie constitutionnelle du droit au logement est en péril. La hausse insoutenable des loyers pousse de nombreuses personnes en situation précaire dans des logements de piètre qualité. Sans intervention étatique, cette tendance est vouée à empirer.

Cette situation est d’autant plus pressante que le changement climatique durcit les conditions de vie et que son effet se fait ressentir d’abord par les plus précaires. Ainsi, les logements mal isolés sont plus exposés aux températures extrêmes. Quant aux coûteuses rénovations assurant la résistance des bâtiments aux inondations, aux séismes et aux incendies, elles sont réservées aux propriétaires aisés ou aux loyers élevés. De même, les populations urbaines précaires vivent en général dans les quartiers les plus denses et ont un accès à la nature limité, notamment en raison de la charge de travail et des prix des transports publics. Elles sont particulièrement sujettes aux îlots de chaleur et à la pollution de l’air, sans échappatoire possible.

Le même problème se pose avec l’énergie. S’adapter aux vagues de froid, aux canicules, ou aux intempéries, surtout dans des logements mal isolés, consomme énormément d’énergie. L’augmentation des coûts aggrave ainsi la vulnérabilité des populations précaires. Celles-ci sont également les premières touchées par les coupures d’approvisionnement, l’accès à une production «citoyenne» d’électricité et de chauffage restant prohibitif (solaire ou pompes chaleur). De même, garantir un accès inconditionnel à l’eau, et ce même en situation de stress hydrique, sera bientôt un enjeu politique de taille. Thomas Sankara disait : « Il faut choisir entre le champagne pour quelques-uns et l’eau potable pour tous », dans notre canton, lors de forte vague de chaleur et de sécheresse, il s’agit déjà de « choisir entre l’eau pour les besoins de premières nécessités et l’eau pour les piscines privées et l’arrosage des pelouses des plus nantis ».

C’est sur la santé que se feront ressentir le plus cruellement les conséquences de la précarité. Les mauvaises conditions de logement et la promiscuité augmentent les risques de maladie, sans parler des conséquences des catastrophes écologiques. Afin d’y répondre, le système de santé doit rester financièrement accessible et ouvert à tout le monde.

Notre groupe s’engagera prochainement au Grand Conseil pour défendre ces positions avec détermination vis-à-vis de la révision de la Loi sur l’Énergie. Celle-ci prend plusieurs mesures longtemps attendues mais omet complètement la dimension sociale. Ainsi encourage-t-elle la rénovation énergétique mais ne protège aucunement contre les augmentations de loyer. Elle ne mentionne jamais les inégalités de logement ou la gentrification liée aux rénovations. La transition du secteur immobilier qu’elle apporte, bienvenue d’un point de vue écologique, risque de creuser les conséquences des inégalités économiques.

Pour faire face à ces problèmes, nous revendiquons :

  • un droit inconditionnel au logement;
  • le maintien en mains publiques des ressources nécessaires à la vie, afin de garantir leur utilisation et exploitation écologique (eau, électricité, chauffage, etc.) ;
  • l’interdiction des coupures d’électricité, d’eau et de gaz en cas de difficultés financières des locataires, et l’interdiction des expulsions ;
  • le contrôle des loyers par l’État avec l’obligation de créer un nombre suffisant de logements à loyer modéré ;
  • l’interdiction de la spéculation sur les logements et les terrains ;
  • un accès gratuit aux transports publics ;
  • un système de santé social et de proximité.

En somme, nous demandons une organisation de l’économie qui assurera une juste répartition des biens et des ressources naturelles essentielles à la vie.

Enfin, pour répondre plus directement à la question, notre groupe craint qu’à l’avenir, les conséquences du dérèglement climatique poussent les plus précaires à s’établir dans des « Zones à Défendre » (ZAD), devenant alors plus exactement des bidonvilles. Il est nécessaire de souligner que ce qui est volontiers qualifié de ZAD n’est pas forcément un choix de vie ou une conviction idéologique. Nous condamnons d’avance la stratégie qui consisterait à dissimuler la précarité derrière des faux-semblants politiques ou culturels. D’autant plus que celle-ci est d’ores et déjà à l’œuvre derrière la criminalisation du sans-abrisme, perçu dans la loi comme du «camping sauvage» mais résultant d’une politique cantonale et communale  refusant de prendre ses responsabilités. Ce n’est pas la précarité qui est criminelle, mais bien l’aveuglement des autorités face à la réalité des conditions de vie.

Il est temps d’agir maintenant en faveur du climat avec des mesures ambitieuses et contraignantes face aux véritables pollueurs, en défendant d’abord les conditions des plus précaires. Pour ce faire, les ZAD ainsi que les nombreux autres mouvements sociaux, sont des moyens de pressions nécessaires.