Bad trip de Nouvel-An à Vevey-libre ?

Jérôme Christen, municipal de Vevey-libre, soutenu dans une démarche séparée par son parti, propose à la Municipalité de Vevey de retirer le préavis 22/2009 portant sur l’avenir de la Place du Marché. La position de Vevey-libre est bien difficile à comprendre, et ce de plusieurs points de vue:

1. Jérôme Christen effectue une rupture de collégialité publique au sein de la Municipalité… avant de savoir si elle sera nécessaire: en effet, demander «à la Municipalité de mettre cette proposition de retrait à l’ordre du jour de sa séance du jeudi 7 janvier», implique normalement que l’on pense que cette proposition à une petite chance d’être adoptée. La rendre publique avant la séance, c’est préjuger de la décision qui y sera prise. Ça ressemble plus à un coup de pub qu’à la recherche d’une solution.

2. Cette initiative met ceux qui la refusent dans l’embarras, car il est difficile d’argumenter à son encontre sans briser au moins partiellement l’embargo sur les travaux de la commission qui a étudié le préavis.

3. La configuration politique autour de la question de la Place du Marché est connue, dans ses grandes lignes, depuis longtemps. Une première décision sur le plan des investissements, le 7 décembre 2006 (voir http://www.alternatives-vevey.ch/documents/PlaceDuMarche12_06.htm), avait déjà montré que le parking souterrain se heurtait à des oppositions croisées. La commission des finances, en balayant le préavis municipal 22/2008 dans sa séance du 29 septembre 2008 confirmait cette situation. Pourtant, au début des travaux de la commission chargée d’étudier le préavis, il a été clairement affirmé par la Municipalité que la décision de déposer ce préavis était unanime, même si l’opposition du municipal Christen au parking souterrain n’était un mystère pour personne. Les votes finaux de la commission n’ont constitué aucun fait nouveau. La proposition de retrait et la rupture de collégialité, pour être sérieuses, auraient donc dû être faites il y a longtemps… ou pas du tout.

4. Le préavis tient compte des résistances au parking souterrain, puisqu’il présente quatre variantes (statu quo, soit 440 places de surface ; souterrain de 400 places + 60 en surface ; souterrain de 280 places + 60 en surface ; 340 en surface). La majorité de la Municipalité a montré sa préférence pour la 3e possibilité en présentant à la commission et au Conseil les conclusions qui y correspondent. Mais elle n’a pas caché que la quatrième solution pourrait lui convenir sans drame. Il a été dit clairement que la réduction de 100 places, commune à ces deux solutions, faisait l’unanimité de la Municipalité. Contrairement au titre du «Mot du municipal» sur le site de Vevey-libre, il n’y a pas de risque de «foncer dans le mur», puisqu’une large porte de sortie est déjà prévue.

5. Si la Municipalité retirait son préavis, le résultat concret serait identique à celui d’un vote du Conseil communal le refusant dans son ensemble: l’état actuel de la place serait maintenu, soit une situation particulièrement contraire «à l’amélioration de la convivialité du centre-ville et de la place du Marché» souhaitées par le municipal Christen – et pour combien de temps ?

6. Un élément important motivant l’initiative de Vevey-libre semble être la supposée «nécessité» de «conditionner la réduction du nombre de places de parc [à la Place du Marché] à la réalisation d’un parking derrière la Gare». Or cette position a été défendue en commission, s’y est retouvée minorisée, sans pour autant que les délégués de Vevey-libre refusent au vote final les conclusions amendées. Cette condition ne semblait alors pas sine qua non. Pourquoi le serait-elle devenue aujourd’hui ?

7. Il faut aussi se garder de présenter le parking derrière la Gare comme une solution miracle et sans problème. Certes elle soulève peu d’oppositions, certes elle permet d’éviter qu’une partie du trafic pénètre au cœur du centre-ville. Mais l’accès venant de l’Est et de l’Ouest continuera à utiliser des rues et places surchargées (Guisan, Gare, Clos, Chenevières) et l’accès Nord par Gilamont, s’il était quasi idéal il y a encore quelques années, tend de plus en plus, du fait des transformations et des nouvelles constructions, à traverser une zone de résidence qui a aussi droit à sa tranquillité. Il ne faut pas procéder à un déplacement des nuisances, mais viser à leur réduction globale. De ce fait le parking derrière la Gare, s’il est souhaitable, ne doit pas être surdimensionné eu égard à ses accès, et ne pourra pas compenser toutes les places de parc qui pourraient être à l’avenir être supprimées au centre-ville.

8. Quant au fond, cette «nécessité» de compenser les places de parc supprimées par d’autres ailleurs doit être relativisée. Prise à la lettre, elle est aussi – comme le parking souterrain – «d’un autre temps» et «valorise le transport individuel au détriment d’une mobilité plus douce au centre-ville». Une part au moins de la compensation de la réduction du nombre de places de parc dans les centres-villes doit se faire par un transfert modal vers la mobilité douce et les transports en commun. Or des mesures améliorant les transports en commun sont déjà à bout touchant. On doit considérer qu’elles pourront absorber une partie de la réduction de 100 places. Faire aujourd’hui tout capoter pour cette seule raison n’est pas responsable.

9. Car contrairement à ce que semble dire Jérôme Christen, la commission, représentative du Conseil communal, n’a pas abouti à rien. Certes les décisions auxquelles elle a abouti sont le résultat de majorités différentes selon les points particuliers. Mais elle a aussi procédé à un vote final majoritaire qui valide l’ensemble de ces points. Il n’y a aucune raison de penser a priori que ces résultats ne se reproduiront pas devant le Conseil communal et que tout sera refusé. Rien n’est évidemment exclu, mais pourquoi choisir à l’avance le scénario le pire ? A moins que Vevey-libre ne soit déterminé tourner lui-même ce scénario-là, c’est-à-dire à faire de la condition du parking derrière la Gare un motif de refus global ?

10. Ce serait incompréhensible et injustifiable, car – sans en trahir le détail – les décisions de la commission vont dans le sens de ce que souhaite Vevey-libre ! Notamment par l’approbation de la réduction de 100 places – qui permet «une mise en valeur de la place» – et par la renonciation au parking souterrain – qui préserve l’avenir et permet la mise en place ces prochaines années des «nombreuses pistes et solutions alternatives figurant dans l’étude effectuée par l’entreprise Estia en collaboration avec différents services de la commune de Vevey, de l’Etat de Vaud et des représentants de milieux économiques et écologistes».

Il faut souhaiter que Jérôme Christen et Vevey-libre se reprennent, et vite !
A. Gonthier

(6 janvier 2009)

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