Recours auprès du préfet du district
contre la votation communale veveysanne du dimanche 17 juin

Monsieur le Préfet,

Le corps électoral veveysan s’est prononcé en un seul vote sur six questions. De ces six, les deux plus importantes font référence à des actes juridiques de vente, «acte de vente et d’achat» pour le premier selon le texte soumis au vote (acte titré en fait « vente conditionnelle – droit d’emption »), «acte de promesse de vente et d’achat» pour le second.

Or nous constatons qu’à ce jour la portée exacte de ces actes n’est pas claire, et n’a pas été clarifiée, même a posteriori, par leurs signataires, respectivement la Municipalité et M. Bernd Grohe pour le premier, et la Municipalité et la société Projet 109 SA pour le deuxième.

De ce fait, le sens du vote lui-même est incertain, et cette situation n’est pas tolérable : soit des éclaircissements juridiquement fondés sont donnés qui lèvent ces incertitudes, soit ce vote doit être annulé.

 

Nous soulignons particulièrement trois questions et les avons posées à la Municipalité par courriel et par lettre (annexée au présent courrier), sans réponse à l’échéance de ce droit de recours. Nous les reformulons ici plus précisément.

1) Peut-on vraiment considérer et comprendre que les deux conditions essentielles posées au chapitre «II-1-Autorisations du Conseil communal» de l’acte «vente conditionnelle – droit d’emption» ont été réalisées par le vote du dimanche 17 juin, et que la condition II-2-« Obtention du permis de construire pour la rénovation » clora la question, cette autorisation pouvant être donnée sans délais par l’autorité communale ? Si tel est bien le cas, la vente du Château de l’Aile à M. Grohe est définitivement entrée en force, et le nouveau propriétaire doit entamer les travaux de rénovation dans les délais prescrits, sous la seule dernière réserve que la condition «II-3-Libération des locaux» par les habitants actuels soit remplie, condition à laquelle l’acheteur s’est d’ailleurs réservé la possibilité de renoncer unilatéralement.
D’autres interprétations sont cependant possibles, plus conformes avec le texte de l’acte de vente du Château. En effet, le premier alinéa du même point II («La vente de l'immeuble feuillet 368 de Vevey est liée à la vente à projet 109 SA […] d'une parcelle d'au minimum 760 mètres carrés à détacher du bien-fonds attenant 367 […]»), et la dernière partie du point II-b («étant précisé que ce plan devra en tout état de cause comprendre la possibilité d'ériger sur la parcelle promis-vendue un nouveau bâtiment d'habitation comportant une surface brute de plancher de 2818 mètres carrés»), semblent établir un lien entre les deux ventes jusqu’à la conclusion définitive de celle du Rivage, avec la conséquence que les travaux de rénovation du Château de l’Aile ne sauraient commencer avant cette date. On imagine bien que le corps électoral, dont le désir premier exprimé par son OUI est de toute évidence que ces travaux de rénovation démarrent au plus vite, n’aurait certainement pas été aussi enthousiaste si ces dernières interprétations avaient été confirmées juridiquement et avaient été portées à sa connaissance.

2) Ne faut-il pas admettre qu’en application du chapitre «V-Conditions», article V-3-c de l’acte «Promesse de vente et d’achat», une nouvelle décision du Conseil communal – et cas échéant du peuple – est incontournable pour confirmer la vente de la parcelle du Rivage lorsque la surface constructible, dont dépend le prix, sera définitivement établie à l’issue de la procédure du Plan partiel d’affectation, lui même soumis à l’approbation du Conseil communal et au référendum facultatif ? Ce chapitre V est en effet formulé comme suit :
«La présente promesse de vente et d'achat est convenue ferme de part et d'autre. Elle est toutefois expressément subordonnée à la réalisation des trois conditions cumulatives suivantes:
1-PPA […].
2-Permis de construire […].
3-Autorisations du Conseil communal:
Autorisations définitives et immédiatement exécutoires, tous délais référendaires échus, que le Conseil communal doit prendre concernant:
a) octroi d’un relatif à l’établissement […] d’un PPA […] (approuvé ce week-end)
b) la légalisation du PPA […]
c) la vente définitive de l'immeuble promis-vendu pour le prix définitivement arrêté par les parties en fonction de la surface brute de planchers autorisée»

Dans 24 Heures de mardi 19 juin, M. le Municipal J. Christen affirme au contraire que «la parcelle est déjà vendue». Il y a donc deux interprétations contradictoires quant à un aspect non-négligeable de la décision populaire. Ce n’est pas tolérable.

3) Au cas fort probable où le vote sur la confirmation de la vente du Rivage mentionné au point précédent serait reconnu comme nécessaire, il est de la plus haute importance de savoir si la menace de conséquences négatives issues d’un lien maintenu avec le contrat concernant le Château de l’Aile  (par exemple dommages et intérêts, voir rachat obligé du Château) pèserait sur ce vote ou non.

 

A ces interrogations déjà communiquées à la Municipalité, ajoutons en une qui concerne le Plan partiel d’affectation : le préavis 5/2007 au point 7.2, page 18 indique que «le périmètre choisi [pour l’établissement du PPA] dans le cadre de ce projet est délimité par les bien-fonds des propriétés communales N° 367 et N° 368 ; de façon cohérente, la décision soumise au vote parle de «l’établissement d’un PPA “Château de l’Aile - Jardin du Rivage”», et le contrat concernant le Château de l’Aile fait de même. Mais le contrat concernant la parcelle du Rivage (page 7 point IV-1) précise que si le PPA est «intitulé Château de l’Aile - Jardin du Rivage», il «touche l’entier de l’immeuble initial feuillet 367 de Vevey» ce qui veut dire le Jardin et l’immeuble du restaurant actuel, à l’exception du Château de l’Aile. Ainsi, l’intitulé et le préavis induisaient les citoyen·ne·s à penser qu’un projet global d’aménagement du territoire serait établi sur l’ensemble du quartier, quai, embarcadère et Château compris. Un des contrats laisse entendre le contraire. Il est nécessaire que cette divergence soit clarifiée.

 

Enfin, dans le cadre du rapport-préavis no 5/2007 concernant la vente et la promesse de vente et d’achat de ces deux parcelles, la Municipalité précisait notamment que l’acheteur s’est engagé à étudier la possibilité d’aider au financement d’un projet culturel. (rapport-préavis, p. 18). Or aucun des deux actes ne fait mention de cet engagement pas plus que du financement y relatif. Qui plus est, la promesse de vente et d’achat concernant la parcelle 367, Jardin du Rivage, prévoit expressément (p. 5, ch. 4) que le prix de vente est fixe, sans aucune autre prestation, à la somme globale de fr. 1'900'000.--.
Cependant, par une communication C15/2007 (Château de l’Aile) de la Municipalité au Conseil communal du 31 mai 2007, l’exécutif précisait que le montant de cet engagement est désormais connu. Il s’agit d’une somme de 1 million qui sera affectée au profit d’un événement culturel se déroulant à Vevey et d’une somme d’un demi-million, versé à la Ville de Vevey à titre de participation au réaménagement du Jardin du Rivage (C 15/2007, p. 2). Il est évident que cela constitue une contre-prestation à la vente et à la promesse de vente conclue par les parties et que le versement de ce montant est subordonné à la condition du transfert de la propriété. On peut estimer qu’il s’agissait là d’un élément essentiel de ces contrats, et que leur absence les rend nuls, et par là même le vote populaire qui s’y réfère.

 

L’accumulation de ces contradictions et points obscurs, qui tend à vider de son sens le vote populaire, m’amènent à conclure en l’état, à l’annulation de la votation communale du 17 juin 2007, les électeurs n’ayant apparemment pas bénéficié des informations essentielles nécessaires à guider leur choix, et ces incertitudes étant de nature à peser de façon négative sur la suite des procédures.

Veuillez croire, Monsieur le Préfet, à l’assurance de ma respectueuse considération.

Alain Gonthier

(20 juin 2007)
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